Cultures urbaines : le sport de la rue aux championnats

Depuis les années quatre-vingt, l’essor du mouvement hip-hop a été accompagné par l’émergence de disciplines sportives. Des pratiques parfois nées dans la rue qui ont permis à des populations peu représentées de s’approprier l’espace public, leur corps et de gagner en visibilité. Focus sur ces disciplines implantées dans les cours d’école et les city stades, jusqu’au plus haut niveau de compétition.

Publié le 20 septembre 2025 Modifié le 23 octobre 2025

Enfant de Vitry, Hugo Doré est un sportif de haut niveau qui a arpenté la ville en long, en large et en travers, gravi ses murs, utilisé son mobilier et fait ses armes en l’escaladant. Son sport ? Le parkour, cet art du déplacement dans l’espace urbain qui permet aux athlètes de s’approprier pleinement leur environnement.

Hugo est un tout jeune adolescent quand il découvre le films Yamakasi. Porté par le groupe d’athlètes éponyme, ce long-métrage, tourné en grande partie à Choisy-le-Roi, popularise ce sport né en banlieue parisienne.

Pour Hugo, c’est une révélation. “À la fin du film, je suis sorti de chez moi pour imiter ce que j’avais vu : sauter des barrières et réaliser des figures.”

Après quelques mois d’expérimentation, le néophyte se rapproche d’une structure dédiée à cette discipline en plein essor. Quelques années plus tard, il devient coach à temps plein. Un rôle de pédagogue qui lui convient à merveille et lui permet d’encadrer la nouvelle génération.

“Aujourd’hui, j’entraîne 10 athlètes, dont 6 font partie du top 10 français”, précise- t-il, heureux de transmettre sa passion.

Comme Hugo, de nombreux sportifs battent le pavé pour se dépenser. Ici, des parties de foot improvisées sur le bitume et dans les city stades. Là, des paniers enchaînés sur les playgrounds de basket, à l’image des jeunes New-Yorkais qui se sont réappropriés ce sport et ses codes dès les années soixante, donnant naissance au streetball, un basket de rue basé sur les dribles dans le dos et des dunks surpuissants, devenu la norme en NBA aujourd’hui.

Des disciplines plus récentes, mettant l’accent sur le show et le côté spectaculaire, trouvent également leur écrin au skatepark du parc des Lilas. Un endroit où la créativité se vit sur des roulettes, soutenant rollers, trottinettes ou planches.

Hugo Derriennic

Double dutch et stunball, Vitry à l’avant-garde des sports urbains

Vitry est aussi le terrain de jeu privilégié d’une discipline méconnue : le double dutch. Issu des Pays-Bas puis popularisé aux États-Unis par la communauté afro-américaine dans les années soixante-dix, ce sport de rue mêlant acrobaties et cordes à sauter s’est épanoui dans la ville. La fédération française y a même élu domicile, et Vitry dispose d’un club et de champions internationaux. Jonathan Mahoto, son président, sept fois champion du monde et pionnier du double dutch en France, en est un exemple, tout comme Jennifer Demosthenes, trésorière et cinq fois championne du monde.
“Le double dutch est très présent sur la ville : on participe à de nombreux événements et on vient dans les écoles pour des initiations qui créent des vocations”, témoignent-ils.

Une mission qui porte ses fruits, comme en atteste l’ascension de Lamia Barka, jeune vitriote qui a découvert ce sport en centre de loisirs avant de devenir tout récemment championne de France.

Dernière preuve de l’émulation qui règne dans la ville : la création d’un sport vitriot appelé le stunball. Ce dernier est né de l’imagination d’Ice, son créateur vitriot qui le décrit comme “un panaché de basket-ball et de handball, un sport d’équipe conçu pour la mixité, accessible quel que soit son niveau, et qui offre une grande liberté de jeu”.

Une discipline à l’image de la ville, jeune et fédératrice, dans laquelle chacune et chacun a sa place.