Joël Doré : chercheur de bactéries
Publiée le 12 août 2021 - Mise à jour le 13 août 2021

Il est directeur de recherche scientifique à l’INRAE, internationalement connu pour ses travaux sur le microbiote intestinal. Mais lorsqu’il franchit la porte de sa maison à Vitry, c’est pour cultiver ses légumes. Rencontre avec le docteur Doré.
D’après son fils cadet, Joël Doré a atteint, à 62 ans, son “Ikigaï”, ce moment où l’on a réussi à mettre ses compétences au service de la société tout en s’épanouissant pleinement. Le propos semble juste à en croire la posture sereine du chercheur qui nous reçoit sur sa terrasse décorée de statuettes zen, son jardin luxuriant en contre-bas. “Lorsqu’on a visité cette maison, on a tout de suite eu un coup de cœur pour le terrain”, se souvient Joël, qui s’amuse beaucoup à s’occuper de son potager.
“Cela correspond aussi à un changement dans nos habitudes de vie. On est tous devenus végétariens. On essaye de réduire au maximum les emballages et on est passé à l’énergie verte.” Même chose pour les transports. Quand il se rend deux fois par semaine à l’INRAE à Jouy-en-Josas, pour avancer ses recherches sur le microbiote intestinal, c’est en vélo électrique.
“Il fut un temps où je faisais vingt déplacements en avion par an. Aujourd’hui, lorsqu’on m’invite à un congrès aux États-Unis, je dis « oui, je serai là en visio ! ”
Et les vingt-cinq kilomètres qui le séparent de l’institut ne lui posent aucun problème. Le scientifique, en plus de sa brillante carrière, ses trois enfants, est aussi un sportif appliqué. “Avant, je faisais beaucoup de course au sein du club Course sur routes, les cross aux couleurs de la ville. Vitry nous a permis à tous les cinq de nous épanouir dans différentes activités culturelles et sportives.”
De là à s’y installer alors qu’on travaille à l’autre bout de la banlieue ? “On a vécu dans l’Illinois où j’ai fait ma thèse, à Clermont Ferrand puis à Paris. Quand on a eu les enfants, on a voulu plus grand.” Et le couple appréciait la mixité et la diversité qu’offrait Vitry.
“C’est parfait pour élever des enfants, leur transmettre une vraie ouverture d’esprit.” Depuis presque trente ans, cette maison accueille les copains, porte grande ouverte.
À l’écouter raconter ce quotidien heureux et ses bonnes adresses vitriotes, théâtre Jean-Vilar, Cellier des vignerons, son plaisir à faire son pain et ses yaourts maison, on en oublierait presque de parler du cœur de sa vie : les bactéries. “J’ai grandi à la campagne, j’étais attiré par les animaux, la biologie. J’ai d’abord travaillé sur les bactéries des ruminants avant de m’intéresser au microbiote humain. De nombreuses maladies chroniques en pleine recrudescence comme l’obésité, la stéatose hépatique ou même l’autisme sont causées par le dérèglement de la relation entre l’homme et ses microbes, lui-même provoqué par notre mode de vie (alimentation, prise d’antibiotiques, modes de naissance…).”
Deux bactéries portent même son nom. “Un hommage de mes collègues pour mes travaux”, précise, en souriant, Joël, qui a aujourd’hui plusieurs casquettes. Responsable scientifique d’une structure de quarante personnes, il est aussi créateur d’entreprise.
“MaaT Pharma, petite société dont je suis cofondateur, basée à Lyon, développe des médicaments pour améliorer le parcours des patients dans les traitements du cancer”, explique-t-il.
L’avenir immédiat pour Joël, ce n’est donc pas la retraite, qu’il prendra sûrement “au vert”, mais de nouvelles thérapies qu’il contribue à mettre en œuvre bien au delà de Vitry-sur-Seine...
Katrin Acou-Bouaziz
1959
Naissance de Joël Doré dans les Deux-Sèvres.
1984
Diplômé d’agronomie (ENSA Rennes), il entre à l’INRAE (ex-INRA).
1995
La famille Doré s’installe à Vitry.
2014
Joël est cofondateur de la société MaaT Pharma.
2019
Il coordonne le projet européen Homo symbiosus.
2021
Son unité lance le projet de science citoyenne : le microbiote français.