Sport : place aux femmes

Réalisé par la rédaction - Publié le 20 janvier 2024

À l'approche des Jeux olympiques, la pratique sportive est en hausse en France, notamment grâce aux femmes (+7 % entre 2018 et 2022). Mais, alors que le sport est facteur d'émancipation et de bien-être, des inégalités perdurent. Dans toutes les catégories d'âge, il y a moins de licenciées que de licenciés. Dans certains sports, les femmes restent très sous-représentées.

À Vitry, les initiatives se multiplient, dès l’enfance, pour favoriser une égalité d'accès. La place acquise de haute lutte par des championnes vitriotes et le rôle essentiel joué par des femmes dans l'univers sportif – entraînement, médecine sportive, etc. – contribuent aussi à bousculer les stéréotypes.

Vitry, ville du sport pour toutes et tous

Afin de lutter contre l’inégalité des pratiques, une politique pour favoriser l’accès au sport des femmes est à l’oeuvre. Dans les gymnases, dans les clubs, dans les centres de loisirs... des initiatives de sensibilisation et d'incitation sont menées.

Malgré la pluie, elles ont le sourire. Bonnes chaussures, gourde et sandwich dans le sac à dos : un dimanche par mois, un groupe de femmes vitriotes partent marcher une petite quinzaine de kilomètres dans les forêts d’Île-de-France. Une initiative de l’Espace les Monis, le centre socioculturel de Commune-de-Paris. “Quand j’ai vu le bien que ça me faisait, j’ai voulu emmener d’autres femmes avec moi ! Certaines n’avaient jamais quitté le quartier”, souligne Sihouar Fekih-Ali, l’une des coordinatrices.

“Le sport est un outil formidable d’émancipation. Notre volonté à Vitry, c’est d’aller chercher les publics éloignés du sport, que ce soient les seniors, les personnes porteuses d’un handicap, les femmes, explique Valentin Ierg, adjoint au maire chargé du Développement local et sportif.

Dès l’adolescence, les filles pratiquent moins que les garçons, alors que dans la petite enfance, on est à égalité.” Ainsi, dans les crèches municipales, les équipes sont attentives aux stéréotypes de genre et proposent les mêmes activités aux filles et aux garçons.

Dans les centres de loisirs primaires et de quartier, pas de distinction non plus pour les activités sportives du mercredi. Des tournois sont même organisés avec des équipes féminines ou des équipes mixtes.

Le projet Allez les filles ! développé avec le collège Audin et la fondation PSG, et parrainé à son lancement par la championne Kadidiatou Diani, leur propose des ateliers multisports et finance la licence pour celles qui décident de s’engager dans une pratique.

Le sport, c’est le baromètre de l’évolution des préjugés dans la société.

Maeva Durand
conseillère municipale déléguée à la Lutte contre les discriminations

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Rendre accessible le sport à toutes et tous

Rendre accessible le sport à toutes et tous est également l’ambition de l’été sportif, avec une variété de pratiques pour l’ensemble des Vitriots, et notamment les jeunes à partir de 15 ans, et une participation significative des filles dans nombre de Pour les sports plus genrés, comme le basketball, des sessions spécifiquement féminines sont proposées.

Et en mai prochain, la ville organise les Olympiades de l’égalité, ouvertes à des équipes obligatoirement mixtes. Au-delà de ces initiatives, c’est l’ensemble des moyens accordés aux associations et clubs sportifs par la municipalité qui vise à favoriser l’accès des femmes au sport.

Pour les subventions, “elles sont plus élevées si la discipline est ouverte sur un quartier prioritaire, si elle forme les jeunes ou fait des efforts pour accueillir les femmes”, explique Valentin Ierg. Les sportives et sportifs de Vitry bénéficient également de la mise à disposition gratuite des équipements de la ville : stades et gymnases, centre aquatique, patinoire, avec vestiaires et agents d’accueil.

Vers la parité à la salle de musculation

À la salle de musculation municipale, au départ plutôt fréquentée par des hommes, une éducatrice a été recrutée pour développer des cours de yoga et abdos fessiers, plutôt tournés vers les femmes. Les douches, anciennement mixtes, ont été réorganisées en espaces distincts.

Résultat, aujourd’hui, la salle accueille autant de femmes que d’hommes. Et les clubs ne manquent pas d’initiatives, comme L’ESV tir à l’arc qui organisait début mars une initiation féminine, dès 11 ans, gratuite.

“Elles ne sont que 35 % dans toute la fédération et, à Vitry, une trentaine sur 80 adhérents, souligne Charlène Dautais, archère confirmée. Alors qu’il n’y a pas besoin d’être fort pour pratiquer, c’est l’arc qui s’adapte à la corpulence.”

Par ailleurs, chaque samedi, la patinoire accueille des équipes mixtes d’enfants et d’adultes débutants de hockey sur glace. Jean-Jacques Foppiani, président du CAV, club de foot historique à Vitry, fait partie d’un groupe de développement de la pratique féminine.

“À l’échelle du district 94, il y a une augmentation de 22 % pour les femmes depuis la saison 2018-2019, soit 3 000 licenciées. Bon, sur un total de 35 000 quand même…”, pointe-t-il.

Dès ce mois de mars, cette commission engage un tour des clubs pour encourager le sport au féminin “Allez, pas chassés, pas glissés ! Les cerveaux et les corps s’échauffent, c’est bon ça !” Lydie Anglionin, éducatrice pour le comité départemental de taekwondo, motive par son sourire une dizaine de femmes, au centre social des Portes-du-Midi. Reprendre pied grâce au sport Orientées en majorité par France travail (ex-Pôle emploi), elles bénéficient de douze séances de taekwondo en plus d’ateliers pour le retour à l’emploi.

“Nous ne sommes pas dans la performance, mais dans une pratique accessible pour être dans la réussite, l’estime de soi”, explique Lydie. Parmi les participantes, Awa n’avait plus travaillé depuis 2015, souffrant d’endométriose sévère, et “retrouve confiance”. Sentiment confirmé par Julie, qui a vécu des moments difficiles après avoir perdu son job et des problèmes familiaux : “Ici, c’est mieux que le psy ou les antidépresseurs !”

Entraîneuses, arbitres, médecins... elles font aussi le sport à Vitry

Au-delà des pratiquantes et des championnes, la présence des femmes dans le sport à Vitry, c’est aussi les agentes d’accueil des stades, les spécialistes de santé, les entraîneuses, les arbitres... Rencontres.

Regardez comme elles s’éclatent !” Des petites filles en chaussettes prennent d’assaut un parcours de cubes en mousse. La journée de Nadia Amrane, agente d’accueil au gymnase Paul-Éluard, débute avec l’arrivée d’une crèche. Ancienne Atsem dans les écoles, elle a été reclassée après des problèmes de santé. “J’aime l’ambiance avec les collègues, et puis le contact est facile dans ce milieu sportif.” Elles sont, comme elle, quelques femmes dans les gymnases de la ville : “Dominique et Nathalie au palais des sports, Martine à Et, dans les réunions, on n’a pas notre langue dans notre poche !” s’amuse Nadia.

Chaïma, kiné du sport

Chaïma Guemour est masseuse-kinésithérapeute à deux pas de la mairie, juste derrière le théâtre Jean-Vilar. Kiné attitrée d’une équipe de handball en Seine- Saint-Denis, elle voit défiler les femmes dans son cabinet vitriot. “J’ai autant de patientes en rééducation après un traumatisme que pour la reprise du sport. Il ne faut pas perdre de vue que la kiné est aussi une porte d’entrée pour débuter ou reprendre une activité, notamment après un accouchement. C’est le point de bascule, la maternité.” Mais elle le martèle : “une femme est aussi bien équipée qu’un homme pour le sport. Même si, en plus des petites grippes ou des mauvaises nuits comme les papas, elle doit parfois jongler avec ses cycles menstruels.” Quand elle a créé la toute première équipe de foot féminine à Vitry, il y a trente ans, Maud Corso a dû jouer des coudes. D’abord, négocier un demi-terrain, puis prouver que les femmes allaient bien jouer tout l’hiver. Expliquer enfin à ses parents qu’elle n’allait pas forcément devenir un garçon. Maud est aujourd’hui entraîneuse à l’ESV. “Par soucis d’inclusion, l’équipe senior femmes accueille toujours des débutantes. Et, au club, les jeunes ont rapidement la possibilité d’encadrer une équipe de petits s’ils le souhaitent.” Toujours pour susciter des vocations.

"S’ils me manquent de respect, je suspends la rencontre"

C’est exactement ce qu’expérimente Mariam Doucara. À 19 ans, elle est en service civique au CAV, autre association sportive de Vitry, en tant qu’arbitre et entraîneuse principale des footballeurs de moins de 10 ans. Tout en étudiant à la fac de droit à Créteil. “Mon premier match à l’arbitrage, je ne vais pas vous mentir, c’était compliqué. J’ai entendu : « t’es trop lente, c’est pas pour toi, t’as rien à m’apprendre ». De la part des joueurs comme des parents. Heureusement, je joue au foot à bon niveau, j’avais la force mentale de me dire : je les ignore, c’est mon match, mon score. S’ils me manquent de respect, je suspends la rencontre et c’est eux qui trinquent. Ça a marché.” Seule femme coach de son club, elle espère faire venir des filles. “Quand je vois qu’une place pour le PSG féminine se vend 5 euros, contre 50 à 200 euros pour les hommes, je me dis qu’il y a encore du chemin à parcourir !