17 octobre : transmettre l’histoire pour mieux vivre ensemble

Publiée le 18 octobre 2021 - Mise à jour le 19 octobre 2021

​​​​​​​Lors de la journée mémorielle du 17 octobre 1961, à l’invitation de la ville et de l’association Ensemble pour l’avenir, Abdelkhader Benarab, journaliste, écrivain et enseignant algérien, a animé une rencontre avec de nombreux et nombreuses Vitriot·e·s au collège Audin. Retour sur l’histoire de la guerre d’Algérie et un riche débat sur la connaissance, la transmission et la lutte contre l’oubli.

En ce 17 octobre 2021, soixante ans jour pour jour après la répressive et meurtrière manifestation qui ensanglanta la communauté algérienne de Paris, le hall du collège Josette-et-Maurice-Audin de Vitry est plein à craquer. Les Vitriot·e·s sont venu·e·s nombreux et nombreuses rendre hommage aux victimes devant la stèle mémorielle au pied de l’écluse du Port-à-l’Anglais, avant de rejoindre l’enceinte de l’établissement scolaire où l’historien, enseignant et écrivain Abdelkhader Benarab anime une conférence guidée par une question centrale : « Comment la tragédie du 17 octobre a-t-elle pu se nouer au cœur de Paris, capitale de civilisation éclairée ? »

Sous le portrait du couple Audin, emblématiques militants en faveur de l’indépendance de l’Algérie, Abdelkhader Benarab rappelle le contexte historique, décortique le conflit qui mena au drame d’octobre. Retraçant l’histoire par les faits, posant les problématiques, les choix, les antagonismes, cernant les protagonistes et leurs objectifs, sans oublier les réseaux de soutien et de solidarité de cette guerre de libération qui débuta en 1954.

Invité par l’association Ensemble pour l’avenir, l’homme de lettres originaire de Sétif, analyse, près d’une heure durant, le rôle de chacun, du FLN à l’OAS, de l’ALN (armée de libération) aux pieds-noirs, des communistes aux harkis. Devant une assemblée attentive et captivée par le récit de son histoire, il n’oublie pas de décrire les faits, sombres et criminels, porté par un désir de lutter contre l’oubli, un devoir de mémoire qu’il questionne cependant. « Si l’injonction "il faut se souvenir" ne me satisfait pas, il convient néanmoins d’entretenir la mémoire, de la construire ensemble, sans rancœur, en s’appuyant sur les témoignages, les archives, les investigations afin d’éviter la reproduction des drames et permettre à chacun de s’inscrire, avec son identité, dans une société apaisée. »

Comment constituer une mémoire historique ? Qui doit porter le « devoir de mémoire » ? L’État ou chacun d’entre-nous ? interroge-t-il. Réactif, impliqué, dépositaire de cette histoire, le public installe le dialogue. Les interventions foisonnent, riches de sens et de pertinence, portant la qualité du débat à hauteur des enjeux.

Comment transmettre aux plus jeunes ? Comment les sensibiliser sans aviver la haine ? Quel rôle l’école doit-elle jouer ? Comment s’inscrire dans un processus durable de réconciliation sans pour autant oublier les faits ? Quelle pédagogie ? Comment écrire l’histoire sans censure ?

Les échanges sont nourris, les uns donnent des pistes pour rapprocher les deux cultures, renforcer l’amitié franco-algérienne, muscler l’éducation populaire, d’autres livrent leurs réflexions et sentiments sur cette guerre qui a « encore besoin d’être reconnue comme telle ». Certains témoignent : « À l’école, on abrège l’histoire de l’Algérie, on passe vite ». « Les Algériens ont l’impression d’être mis à l’écart comme leur histoire et leurs drames. » « L’apaisement viendra si l’État reconnaît officiellement les faits dans leur sauvagerie. Le pardon ne peut venir qu’après une reconnaissance de la réalité tragique du peuple algérien. »

« Un pardon nécessaire pour que le vivre ensemble se renforce dans la paix, rappelle le maire, Pierre Bell-Lloch, en clôture de ce temps d’échange. Nous devons dépasser la haine de cette histoire traumatisante, avancer ensemble dans la vérité historique afin que ce passé commun ne nous divise plus. »

Marie-Stéphane Guy

 

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