Lutte renforcée contre la réforme des retraites

L’intersyndicale appelle à une nouvelle journée de grève mercredi 15 mars contre la réforme de la retraite. À Vitry, une opposition se construit dans la durée. Depuis la mobilisation du 7 mars, près de 70 % des salariés du site Pizzorno, au Port-à-l’Anglais, ont stoppé la collecte des déchets, notamment dans le 15^e arrondissement de Paris, tandis que des soutiens bloquent la sortie des camions pour renforcer le rapport de force contre le projet de réforme.

Blocage à Pizzorno

« Dès ce lundi, prévient une enseignante à la retraite en soutien, nous assurerons un blocage la nuit pour éviter que des camions ne soient extraits comme cela s’est fait au petit matin aujourd’hui. » Les salariés en grève signalent en outre que des employés de la société multisites ont été dépêchés depuis le sud de la France pour réaliser une part du travail non-fait.

« Nous nous concentrons à animer les luttes du secteur des déchets très bloquantes, indique Valentin Soen, responsable de l’UL CGT, debout près du barnum et de la banderole de plastique noire « Pizzorno en grève, no passaran ». Cela gêne, mais manifeste le désaccord global de l’ensemble des salariés ».

10 ans d'espérance de vie en moins

Si à Pizzorno on se mobilise pour obtenir de meilleurs coefficients comptant notamment pour l’ancienneté en interne, on s’alarme aussi beaucoup des conséquences du projet de réforme.

Remontés contre l’examen à marche forcée du texte au Sénat, adopté au vote bloqué, méfiants sur les mesures de pénibilité jugées floues et disparues pour eux depuis 2017, ils se sentent « prêts à aller jusqu’au bout ».

« Je crois qu’on a une espérance de vie de moins dix ans par rapport à d’autres métiers, souligne Jean-Pierre Mascary, 58 ans, délégué syndical et conducteur. Pourtant on pousse, on tire, qu’il pleuve ou pas, on a du bruit, des odeurs insalubres, des horaires décalés, des charges lourdes… » 

64 ans, la mort derrière le camion

« Parfois, ce sont des bennes de 30, 100 kg qu’il faut déplacer, indique Kalibé Sissoko, 50 ans. Certaines, on n’y arrive même pas. Cela fait mal au dos, aux genoux. » RAS sur les charges pour Sime Manor, 34 ans, qui fait du sport, mais rage contre ses chaussures de sécurité qui lui provoquent des problèmes aux pieds. « Jusqu’à 64 ans derrière le camion, c’est impossible, jugent-ils tous, le maximum serait 58 ou même 50… Si la réforme passe, c’est la mort derrière le camion. »

Sur place, les appuis rassemblent des salariés venus de la RATP, de l’Éducation nationale, ou bien de simples citoyens sympathisants, ou encore des personnalités politiques comme le maire de Vitry, Pierre Bell-Lloch, la députée Mathilde Panot et des élus locaux de groupes politiques variés.

Un sympathisant trentenaire discute sur place. « Il faut soutenir ces salariés de premières lignes », estime ce militant nourri au mouvements anti-CPE et Occupy la Défense en 2008 à la crise des subprimes.

Tout près du barnum, Alex El Gamal, syndicaliste CGT remarqué de la RATP, reconnaît « une certaine lassitude des salariés à la radicalisation du gouvernement. Le mouvement doit se renforcer, générer des solidarités, du collectif et des soutiens là où les actions se passent. La lutte ne s’arrêtera pas jeudi et l’opinion publique est avec nous ».

« Ce blocage est important, car nous sommes à un tournant, estime de son côté le maire, Pierre Bell-Lloch. La grève et le blocage à Pizzorno sont suffisamment forts pour créer un désagrément et concerner les habitants des beaux quartiers du XV^e arrondissement qui auront devant eux les poubelles non-ramassées. » Des barnums ont été fournis par la commune pour abriter les piquets et soutiens qui bloquent le garage.

Frédéric Faure, à la SNCF, représentant syndical de proximité au Technicentre des Ardoines, a également rejoint le piquet de grève. « Ce blocage-là est important, il faut l’aider, car la grève du ramassage des déchets est très visible, comme celle des transports », estime-t-il, en indiquant son effet reconductible à la SNCF.

Grèves reconductibles

« La mobilisation doit s’inscrite dans la durée », estiment les militants, constatant la rigidité du gouvernement face à la mobilisation d’ampleur. « Il faut dépasser le 15 mars, date à laquelle la commission paritaire fusionnera le texte des sénateurs et celui des députés, et la date du 16 mars, à laquelle la réforme doit être votée par le Parlement », jugent-ils.

L’exemple à suivre est dans tous les esprits : la lutte victorieuse contre le Contrat première embauche qui, malgré son adoption en 2006, fut abandonné par le gouvernement qui promettait aux jeunes des salaires minorés.

Ainsi, la grève reconductible a-t-elle été décidée par les agents de la ville ce mardi matin en assemblée générale à l’appel de la CGT et de l’UFICT.

« La bataille va se poursuivre, déclare une représentant de l’UFICT. Tant que les entreprises et services produiront, le gouvernement ne pliera pas : ce qui compte, c’est aller à la manifestation en tant que gréviste, se battre maintenant et pas dans trois ans… »

Grève du mercredi, actions spécifiques dans le département, caisse de grève départementale étaient à l’ordre du jour. Une AG déterminera chaque matin, dès jeudi, la poursuite ou pas des actions.

Si mercredi 15, les écoles ne sont pas de la partie comme le 7 mars (11 écoles fermées sur 41), plus de la moitié des animateurs des centres de loisirs ne seront pas à leur poste, 6 des 21 centres seulement seront ouverts et les familles devront pourvoir au repas de leur enfant.

Gwénaël le Morzellec

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