Portrait : Vanessa Veuillet, l’environnement en tête

“Vous, vous venez pour du pain : on en a le mardi et le vendredi.” “Non, c’est pour l’interview.” “Ah ! prenez un thé, installons-nous.” Vanessa Veuillet, gérante, 35 ans, se raconte, assise à l’une des tables de la nouvelle épicerie bio et de snacks véganes et végétariens faits maison, avenue de l’Abbé-Roger-Derry. Elle arbore sur son t-shirt le rigolo logo de son magasin Les Mains dans la terre. Un magasin, anciennement Phildar, préempté par la ville pour dynamiser le développement commercial et artisanal, diversifier les commerces, pour lequel Vanessa a remporté l’appel d’offre.

À 10 h 30, les clients affluent dans la boutique où on a pendu la crémaillère quinze jours plus tôt.

Qui pour un café en vrac à moudre soi-même, “j’aime l’odeur du café fraîchement moulu, c’est accueillant, réconfortant, familier” ; qui pour des fromages de chèvre normands, “on les cherche le plus possible en circuit court et on goûte d’abord ce que font les producteurs”.

À l’entrée, des bocaux récupérés et stérilisés et pochettes en papier kraft déjà utilisées rappellent que le vrac est ici roi, pour éviter les déchets de conditionnement.

Des galeries d'art aux maraîchages

“Mon credo, lance la résidente du quartier Gare/ Jean-Jaurès depuis deux ans, c’est, plutôt que critiquer, agir dans la ville où j’habite. Sans forcément être révolutionnaire, je veux améliorer la propreté, faire que les gens se rencontrent…”

Cette femme d’action, impatiente, native de Neuilly-sur-Marne et élevée dans une famille recomposée, aînée de cinq enfants, interrompt son master en arts plastiques pour travailler dans l’édition et l’art, puis change son cap il y a deux ans. Employée de galerie d’art à Paris, Vanessa met à profit la pause sanitaire et accélère sa réflexion critique afin d’agir plus en accord avec sa pensée : “tous ces déchets, ces voyages polluants en avion d’un bout à l’autre de la planète pour les foires internationales d’art”… Et la voici qui s’aventure en maraîchage dans les Hauts-de-France pour un stage d’un mois.

“Vivre sa ville” 

“Stimulante, mais éprouvante”, cette expérience l’amène à affiner son projet : une activité locale de vente de produits bio. Donc résolument ancrée à Vitry. Dans son quartier Gare/Jean-Jaurès, elle noircit aussi accessoirement ses ongles dans la terre des plates-bandes de la rue pour les végétaliser et nettoyer les espaces publics des déchets avec le collectif Vitry gare ou avec la ville lors du World Cleanup Day. Et, au magasin du Centre-ville, elle pense mettre à disposition un seau pour les clients qui apporteraient leurs épluchures destinées à un composteur proche (à implanter) pour faire le terreau des parcelles végétalisées du quartier.

Le collectif reste une fondation pour cette aventurière qui aime retrouver l’atmosphère de son enfance, “les grands moments de cacophonie heureuse quand, en famille recomposée, on partait en vacances ensemble…” Aussi, est-elle ravie d’être avec trois associés, son mari Reza, son père, Olivier, jeune retraité, et son amie, Séverine, qui l’aident presque au quotidien, et ravie encore de voir les liens se tisser entre les clients qui font la queue pour du fromage.

“C’est tout bénef’ d’apprendre à se connaître, d’être dans une atmosphère apaisante, de prendre le temps de vivre sa ville.”

Un peu accaparée par ce lancement, Vanessa cogite déjà une autre aventure : “ouvrir une autre boutique, toujours à Vitry, cette fois dédiée à l’art, et avec un collectif”

 Gwénaël le Morzellec